Les dessous de la couverture du Centre de stockage de la Manche
La pelouse verte de la couverture recouvre un dispositif de protection composé de multiples couches. Plongée au cœur de cette barrière protectrice.
La couverture du Centre de stockage de la Manche (CSM) constitue une ultime barrière de confinement pour protéger les déchets radioactifs d’éventuelles intrusions humaines ou animales, et les mettre à l’abri de l’érosion et de l’eau sous toutes ses formes : gel, pluie, infiltrations, etc. Pour assurer ce rôle de protection sur le long terme, elle doit être imperméable, stable, et ne nécessiter qu’un entretien réduit.
Six strates de matériaux
La couverture est ainsi constituée de six couches de matériaux qui alternent sur 2 à 8 mètres de d’épaisseur. Une première couche de terre végétale engazonnée a pour objectif de protéger de l’érosion et de renvoyer dans l’air 50 % de la pluie par évaporation du sol et transpiration des plantes. Sous cette première couche, une barrière minérale, constituée de schistes et de grés compactés, empêche les intrusions animales. Enfin, une couche de sable assure le drainage de l’eau de pluie qui se serait infiltrée jusqu’à la membrane bitumineuse qui assure l’étanchéité du dispositif.
Située au cœur de la couverture multicouches, cette membrane imperméable de 5 millimètres d’épaisseur est constituée d’un feutre géotextile en polypropylène complètement imprégné de bitume. Enfin, sous celle-ci, se renouvelle l’alternance de sable drainant et de matériaux compactés.
Un dispositif de drainage efficace
Un des principaux objectifs de la couverture du CSM est d’empêcher l’eau d’atteindre les colis de déchets. La forme en dents de scie de la couverture, à la manière des toits d’usine, favorise la collecte de l’eau de pluie avec un réseau de caniveaux et de canalisations. L’eau qui n’est pas recueillie en surface s’infiltre dans la terre végétalisée, puis dans les matériaux de la couverture, où elle est récupérée par des drains situés au-dessus de la membrane bitumineuse.
Au regard des volumes d’eau qui tombent tous les ans sur le CSM, la quantité d’eau infiltrée jusqu’à la membrane est faible : cela représente en moyenne entre 20 % et 30 % des eaux de pluie. D’autres drains sont également disposés en dessous de la membrane bitumineuse pour capter les rares eaux qui réussiraient malgré tout à franchir cette barrière imperméable. Ces infiltrations sont connues et bien localisées : il s’agit d’eaux de pluie qui ont réussi à s’infiltrer en pied de talus, en bordure de la couverture. En dehors de ces infiltrations périphériques, qui n’ont pas été en contact avec les ouvrages de stockage, la surveillance confirme la très bonne imperméabilité de la couverture.
Les eaux de pluie, les eaux de drainage ou encore celles captées dans la galerie souterraine disposent chacune d’un réseau qui leur est dédié, y compris dans le bâtiment « des bassins » vers lequel elles sont toutes orientées. Toutes les eaux collectées y sont analysées avant d’être transférées sur le site voisin Orano La Hague, où elles sont soumises à de nouveaux contrôles radiologiques et physicochimiques avant leur envoi vers leur point de rejet autorisé dans l’environnement.
Une couverture souple et robuste
Lors de l’exploitation du CSM, et surtout lors des premières années, certains colis de déchets pouvaient ne pas être complètement remplis, laissant ainsi à l’intérieur du stockage quelques espaces vides. Avec le temps et le poids de la couverture, ces espaces peuvent occasionner des affaissements et des déformations de la couverture.
La membrane bitumineuse est largement capable d’absorber ces déformations grâce à ses propriétés élastiques : elle peut supporter jusqu’à 25 % d’étirement sans perdre son étanchéité. Preuve en est en 2009 quand, à la suite d’un affaissement localisé au nord du site, les équipes de l’Andra ont décidé de retirer les différentes couches de matériaux situées au-dessus de la membrane. Mise à nu, la membrane était indemne et sa souplesse lui avait permis de s’adapter à la déformation due à l’affaissement, en préservant ses performances d’étanchéité.
Depuis sa pose entre 1991 et 1997, l’Andra a également constaté des glissements de la couverture sur les bords du site. Avec le poids de différentes couches et la pente des talus, la couverture tend à glisser lentement sur les côtés, de l’ordre de quelques millimètres par an. Les mouvements enregistrés restent largement compatibles avec les capacités d’extension de la membrane bitumineuse. Pour stabiliser la couverture, des travaux de confortement ont été réalisés au début des années 2010 sur trois talus. Grâce à ces travaux, les glissements se sont stabilisés.