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Les enjeux du recensement de la faune et de la flore au CSM

En 2017-2018, le Centre de stockage de la Manche (CSM) a réalisé le recensement des animaux et végétaux peuplant son site et ses abords. Cette opération permet de comparer l’évolution des espèces avec celles qui ont déjà été répertoriées au niveau régional, mais aussi et surtout d’évaluer l’impact du site sur l’environnement.
 

isabelle Guittonneau, chargée d’affaires environnement et qualité à l’Andra

Initié en septembre 2017, le recensement de la faune et de la flore peuplant le site du CSM s'est achevé à l'été 2018. Les résultats ont permis de mettre à jour l'étude d'impact du Centre.

« Pour évaluer l’impact environnemental du CSM, il nous faut connaître et observer la flore et la faune, et évaluer si des évolutions significatives se sont produites sur plusieurs années », explique Isabelle Guittonneau, qui pilote le projet en tant que chargée d’affaires environnement et qualité à l’Andra. « Contrairement aux sites plus récents, le CSM ne dispose pas de référentiel initial car, lors de sa conception dans les années 1960, ce type d’inventaire n’était pas demandé : nous ne possédons pas de recensement pour les différentes populations d’oiseaux, insectes, batraciens, mammifères, fleurs, arbres présents sur le site avant sa construction. En revanche, les études intermédiaires réalisées nous permettront de comparer les relevés actuels avec les comptages réalisés il y a dix ans, voire plus anciens, lorsque les données sont disponibles. »

Comparer à la région

La pipistrelle de Kuhl. Elle mesure moins d’un pouce

La réalisation de ce recensement a été confiée à la société Egis, disposant de spécialistes capables de reconnaître et de compter toutes les espèces à observer sur le site et ses abords. Isabelle Guittonneau précise : « Nous étudions l’impact environnemental du CSM au niveau du site lui-même, mais aussi dans les zones humides, petits bois et autres zones d’intérêt situées à sa périphérie. »

Au préalable, le prestataire a réalisé un travail bibliographique afin de disposer d’un recensement régional, voire départemental, des espèces endémiques. Autant de données qui lui permettront de déterminer si la présence des différentes espèces animales et végétales recensées est significativement plus importante ou plus faible que dans le reste du territoire. Mais pas seulement.

Premiers résultats

Les premières études faunistiques réalisées dans le centre et les milieux proches ont permis d’inventorier quatre groupes :

  • Les oiseaux, avec dix-sept espèces recensées. Sept d’entre elles sont patrimoniales au niveau national et/ou régional, en tant que nicheuses dans divers milieux (chardonneret élégant, faucon crécerelle, gobe-mouche gris, goéland argenté, pipit farlouse, tarier pâtre, et traquet motteux).
  • Les amphibiens, avec des rainettes vertes dans les landes ou les talus.
  • Les chauves-souris, avec deux espèces recensées dans les lisières boisées ou dans les landes, telles que la pipistrelle de Kuhl.
  • Les insectes, dont très peu d’espèces sont recensées en raison des conditions météorologiques et de la période de prospection assez tardive.

À la recherche d’un «oiseau rare»

Le chardonneret élégant

Le recensement mis en place sur et autour du CSM s’appuiera également sur l’Inventaire mondial de l’état de conservation global des espèces végétales et animales réalisé par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Isabelle Guittonneau explique : « Chaque espèce, qu’elle soit animale ou végétale, s’est vu attribuer un statut en fonction d’un éventuel risque d’extinction. » Dans cet inventaire, les espèces sont classées en différentes catégories, allant de « préoccupation mineure » (pour les espèces largement répandues et abondantes) à « danger critique » (pour celles dont le risque d’extinction à l’état sauvage est extrêmement élevé), passant par trois stades intermédiaires : « quasi menacée », « vulnérable » et « en danger ».

« La faune s’est largement développée sur le site de l’Andra ces dernières années, et de nombreux espaces protégés bordent le CSM. Jusqu’à aujourd’hui, les précédents recensements n’avaient pas identifié d’espèce animale menacée. » [Et à la date de l'interview, fin 2017, le recensement en cours n’était pas assez avancé pour présenter des résultats NDLR]. En revanche, la flore du site compte déjà une espèce protégée, le centaurium scilloïdes, ou érythrée, une fleur qui s’est largement implantée dans les zones sud et ouest du centre. « Cette espèce est observée depuis le précédent recensement, et nous suivons son développement avec attention. »

« La faune s’est largement développée sur le site ces dernières années »

Isabelle Guittonneau

Limiter l’impact sur l’environnement

Le cas pratique du centaurium scilloïdes permet de comprendre tout l’intérêt de ces recensements de la faune et de la flore. « Si nous devions construire un bâtiment, poursuit Isabelle Guittonneau, il faudrait bien entendu faire en sorte d’éviter les zones où cette espèce s’est implantée, afin de limiter au maximum l’impact de cette construction sur l’environnement. »

Le recensement pourra également mettre en évidence la chute de la population d’une espèce. Une étude serait alors menée afin d’en déterminer les causes.

La sûreté avant tout

La bruyère cendrée

Mais la mesure d’impact se fait à double sens, car la sûreté du site doit primer, insiste Isabelle Guittonneau. « Certains espaces sont tondus régulièrement, d’autres non, ce qui nous permet de comparer l’évolution de la couverture végétale, comme l’installation d’arbres et les conséquences de leurs systèmes racinaires. Nous devons anticiper tout impact sur la couverture et donc décider, au regard de l’observation de ces parcelles, quel entretien s’avère nécessaire pour ne pas compromettre la sûreté du site. »

À cette fin, l’Andra laisse certaines zones évoluer naturellement, mais sous étroite surveillance, afin de vérifier si la pratique rejoint la théorie en termes d’étendue des systèmes racinaires. « Des ajoncs ont, par exemple, largement colonisé le site, mais notre suivi montre que leur système racinaire reste sans conséquence sur la sûreté de l’installation, et qu’il empêche d’autres espèces de se développer. »

Anticiper les dégâts futurs

La potentille d’Angleterre

« De même, une inspection visuelle est effectuée pour identifier d’éventuels terriers ou galeries d’animaux pouvant entraîner des dégâts sur la couverture, explique Isabelle Guittonneau. Si tel est le cas, on identifie le type d’animal concerné, on étudie les moyens de le chasser du site et on procède à la remise en état de la couverture. »

Ce nouveau recensement faunistique facilite également les études d’impact des éventuels travaux à venir. « Nous menons actuellement des études sur la pérennisation de la couverture du CSM. Pour chaque option techniquement envisageable, nous devrons mener une étude d’impact. Le travail de recensement réalisé représentera autant de temps gagné. »

De nouvelles espèces répertoriées

La potentille d’Angleterre est une espèce de la famille des rosacées. C’est une plante vivace, qui résiste aux rigueurs des saisons. Elle préfère les sols acides. On la trouve sur les pelouses et les bords de chemins. Elle est présente dans l’Ouest et le Centre de l’Europe.

La bruyère cendrée, quant à elle, est une espèce de la famille des éricacées. C’est la plus commune des bruyères d’Europe. On la trouve dans les landes ou les bois clairs, sur un sol acide et assez sec. Elle n’est présente que sur la côte atlantique et dans les terres jusqu’aux Cévennes.