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Nouveaux forages au Centre de stockage de la Manche

Depuis septembre, des foreuses sont entrées en scène au Centre de stockage de l’Andra dans la Manche. Leur mission ? Renforcer le dispositif de surveillance de la nappe phréatique grâce à la pose de quatre piézomètres supplémentaires.

Que se passe-t-il dans le sous-sol, et notamment au niveau de la nappe phréatique ? La question est fondamentale pour tout site de stockage de déchets radioactifs, y compris pour le Centre de stockage de la Manche (CSM), bien qu’il ne reçoive plus de colis depuis 1994. « L’eau est le principal vecteur du transport des éléments radioactifs, explique Céline Righini-Waz, géologue à l’Andra. S’il y a un relâchement en provenance d’un colis, c’est elle qui les véhiculera. D’où l’importance de surveiller la nappe d’eau située sous la zone de stockage. »

Pour assurer ce suivi, le CSM dispose depuis les années 1990 d’une soixantaine de piézomètres(1) répartis dans l’enceinte du centre et à l’extérieur, dans la campagne environnante. Leur rôle : mesurer le niveau de la nappe et permettre la réalisation de prélèvements pour détecter la présence éventuelle de radionucléides. Depuis une dizaine d’années, aucun nouveau forage n’avait été effectué sur le site. Mais une nouvelle campagne a démarré en septembre dernier afin de compléter le dispositif existant.

(1) Forages en profondeur permettant un suivi des eaux souterraines.

Renforcer et contrôler

Atelier de forage pour pose de piézomètre.

Il s’agit tout d’abord de l’installation de quatre nouveaux piézomètres au nord du site. « Cette décision répond à une demande de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), explique Céline Righini-Waz. La surveillance doit être renforcée dans cette zone, car elle se situe à proximité de cours d’eau, notamment du Grand Bel et de la Sainte-Hélène. »

L’Andra profite également de l’opération pour répondre à une autre demande de l’IRSN, visant cette fois l’analyse d’une faille dans la roche située sous le site. « Depuis qu’un séisme s’est produit en 2019 à Teil, en Ardèche, à proximité d’une centrale nucléaire, l’IRSN redouble de vigilance lorsqu’il s’agit de la connaissance et du suivi des failles, note Céline Righini-Waz. Le sous-sol du CSM en comporte une, même si elle n’a pas bougé depuis des millénaires. »

L’Andra va donc réaliser un ou deux forages supplémentaires pour prélever une « carotte » de la roche au niveau de cette faille. « L’analyse de cet échantillon permettra de connaître son histoire, et de dater les derniers mouvements du sol et de confirmer que la faille est toujours inactive », indique Céline Righini-Waz. À la différence des quatre autres forages, celui-ci sera rebouché, sans pose d’un piézomètre.

Atelier de forage incliné pour prélèvement d’échantillons de la faille.

Une opération de précision

Tête de carottier.

Lancée en septembre, l’opération devrait s’achever en novembre 2024. La principale difficulté est liée au fait que l’ensemble des forages doit faire l’objet d’un « carottage ». « Il y a quelques années, il nous arrivait de réaliser des forages simples : on creusait en détruisant la matière. Désormais, nous réalisons systématiquement des carottes géologiques pour garder une trace de la roche que nous avons forée, témoigne Céline Righini-Waz. Or, c’est une opération délicate. Le “coup de main” du foreur est décisif. Il faut savoir impulser la bonne pression, au plus juste, pour satisfaire notre exigence d’un taux de récupération de la carotte de 95 %. » L’Andra fait appel à des prestataires rodés à ces techniques.

L’ensemble de ces prélèvements va rejoindre la carothèque du Centre de  l’Andra en Meuse/Haute-Marne, une sorte de bibliothèque des carottes qui garde méthodiquement tous les forages de l’Agence. Un patrimoine scientifique exceptionnel, utilisé aussi bien par les experts de l’Andra que par des chercheurs. 

 

Pourquoi surveiller la nappe phréatique ?

L’eau est un élément clé de la surveillance des sites de stockage de l’Andra. D’où l’importance du modèle hydrogéologique* mis au point par les experts de l’Agence pour simuler les écoulements souterrains et déterminer par où d’éventuels radionucléides risqueraient de s’échapper en cas de fuite, à quelle vitesse, et au bout de combien de temps ils pourraient rejoindre les cours d’eau. Les mesures des piézomètres sont précieuses pour affiner et alimenter ce modèle et vérifier que les données recueillies sont conformes aux simulations numériques.

* L’hydrogéologie est la branche de la géologie qui concerne la circulation de l'eau dans le sol et les roches. Les modèles mathématiques permettent de reproduire et de simuler la complexité de ces phénomènes.